Endless Portraits (série)

Nicolas Clauss
  • Kinsley©nicolasclauss

Endless Portraits / Wayne / New York - 2014 from Nicolas Clauss on Vimeo.

Endless Portraits (série),  portraits vidéographiques génératifs, 1 ordinateur, 1 écran vertical (40 pouces ou plus), 1 programme

 

Poursuivant la recherche menée dans les vidéographies aléatoires, Endless Portraits est une série de portraits en mouvement filmés à travers le monde (Séoul, Sicile, Bangalore, New York ...). Présentés sur de grand moniteurs verticaux, ces portraits d'un nouveau genre explorent la dilatation du temps vidéographique.Ils n'ont ni début ni fin et rejouent à l'infini, selon une écriture générative, les quelques secondes de film dont ils sont constitués.

 

Endless portraits. Portraits sans fin. Mais aussi sans commencement, faudrait-il dire, pour mieux saisir que l’expression « sans fin » renvoie à l’intemporalité, à une création sur l’intemporel situé dans des espaces. Nicolas Clauss inscrit sa démarche dans le plus pur classicisme : si le grand modèle du genre demeure, contre vents et marées, la Joconde, on retrouve ici la fixité légendaire d’un regard troublant. On cherche toujours un point d’échappement face au regard figé qui ne nous lâche pas et qui se constitue en immuabilité, tantôt légère, tantôt grave ; mais force nous est de déclarer notre impuissance face à ce regard qui reste dominateur.

Qu’est-ce qui change la donne dans ces « portraits sans fin » ? C’est une vibration intérieure du sujet que la caméra-vidéo essaie de capter et qui en fait une histoire individuelle, avec l’entassement de ses traces, de ses dérives : ainsi Wayne à New-York, Eva en Sicile, Model ou Mother and Child à Beijing, portent les marques d’une histoire secrète qui ne sera pas révélée au-delà de ce que l’on peut y voir et de ce qu’il est donné à l’imaginaire de chacun de formuler, d’exprimer, de recréer. C’est cela que Nicolas Clauss appelle l’« aléatoire » du personnage et de la proposition ; c’est l’hésitation, ou plutôt le frémissement que l’image dégage dans la constance de son tremblement : et pourtant ce n’est pas vraiment elle qui frémit, mais le paysage qui tout autour lui fait décor. C’est inscrire sa « petite » histoire dans l’arrière-plan qui bouge dans le même « infini » qu’est l’ordinaire du quotidien en souffrance de devenir Histoire, sans que cela puisse aboutir.

Il n’y a plus, du coup, que le murmure de l’évènementiel qui accompagne le balancement du « reste » et essaie, avec douceur et tendresse, d’accompagner l’image dans un devenir qui ne lui appartient pas en propre : un « devenir sculpture » se trace, un tutto-tondo de sculpture, comme si la vidéo pouvait l’arracher à son ancien statut de peinture et l’amener vers une nature nouvelle à laquelle elle n’aurait jamais songé, qu’elle n’aurait su prévoir. C’est dans cette nouvelle épaisseur qu’il faut encadrer le travail délicat et minutieux que nous propose Nicolas Clauss.

 

 

Jean-Paul Manganaro

 

Vu au CENTQUATRE-PARIS

du 03.11.2016 au 06.08.2017

 

Site de l'artiste

http://www.nicolasclauss.com